Alors, comment se passe votre week-end ?
J’avance aujourd’hui dans le noir. Je démarre ce texte en sautant dans l’inconnu.
Nous enchaînons les crises, du problème climatique, à la guerre en Europe en passant par la crise sanitaire.
Cette situation m’a amené à réfléchir au sens et à la gradation des inconforts de la vie. Et au sens des mots. La presse nous explique que nous traversons une période d’incertitude, on ne sait pas à quoi ressemblera notre monde demain.
Ce mot déclenche le malaise, car nous avons été éduqués dans la crainte de l’incertitude. Le but est de la réduire, de la restreindre au maximum. Anticiper, prévoir, planifier. Ça fait partie de notre boulot, nous sommes tous un peu entrepreneurs. Dans le milieu professionnel, nous voulons avoir un coup d’avance. Toujours.
Quel orgueil !
Pas étonnant que la surprise soit presque devenue un synonyme d’échec. « Quel manque de prévoyance. », entend-on les dirigeants se voir sanctionner par la presse et l’opposition à la moindre crise. « Gouverner, c’est prévoir », dit la maxime. Elle définit notre vision du leadership.
Donc, nous sommes conditionnés dans nos métiers et nos vies par la hantise de l’incertitude. Réussir dans la vie, ce serait remplacer l’incertitude de la jeunesse par la stabilité de la maturité ? Vraiment ?
J’ai le sentiment aujourd’hui que notre société est profondément façonnée par cette croyance. Un symptôme ? Notre vision de l’éducation a longtemps accordé un poids exagéré à la formation initiale et négligé, voire méprisé, la formation continue.
L’incertitude fait peur. Les discours politiques invoquent cette idée régulièrement pour faire résonner dans nos têtes la petite musique de l’anxiété. L’inconnu est un épouvantail bien commode.
L’agression de l’Ukraine nous permet douloureusement de réfléchir à notre méprise. Le problème n’est pas l’incertitude, mais l’insécurité, une menace immédiate et directe à notre capacité de survie. L’insécurité crée de l’incertitude, mais la réciproque n’est pas toujours vraie.
D’une certaine façon incertitude et insécurité s’opposent. L’insécurité c’est le risque de mort. L’incertitude, c’est la vie, c’est la surprise, la possibilité d’heureux hasards. C’est un moteur de la création, la fameuse sérendipité.
L’inconfort de l’incertitude nous rappelle simplement que nous sommes en vie, et qu’on peut — qu’on doit ? — apprendre à être serein et confiant face à elle.
Et après tout, quoi de plus pesant, de plus ennuyeux que la certitude ? Savoir où nous serons dans un an, dans dix ans, dans vingt ans ? A-t-on vraiment besoin de ça ?
Vivre c’est embrasser l’incertitude en se concentrant sur le présent, c’est s’autoriser à rêver des futurs différents.
Et œuvrer pour la sécurité, la sienne est celle de tous.
Car par delà les chocs, la vie est là et continue. L’incertitude ne doit pas nous faire peur. À nous en réalité de l’accueillir comme une opportunité de vivre, vivre pour faire barrage à l’insécurité, grâce au groupe, à l’action commune et à la solidarité. Si l’Europe, si notre Société se reprend et se rassemble, c’est pour cela. Le groupe est un antidote à l’insécurité, c’est sa fonction originelle, tribale. Le besoin de sécurité rend dangereux l’individualisme excessif.
L’incertitude n’est pas l’ennemi. Ce peut même être un facteur d’égalité, dès lors qu’elle pousse à œuvrer pour le groupe et à lutter ensemble contre l’insécurité collective. C’est un symbole de liberté lorsqu’elle nous amène à construire un futur plus souhaitable.
Le monde a changé. L’incertitude est revenue. Était-elle jamais partie ? J’ai l’espoir qu’elle remette la société et le monde en mouvement, qu’elle soit source de créativité, de solidarité au service d’une plus grande liberté et égalité, face à un ennemi commun, l’insécurité.
Podcast
Cette semaine, le podcast Double Vie reçoit Lloyd Chéry. Lloyd est journaliste culture au Point, animateur du podcast « C’est plus que de la SF », professeur, et anthologiste. Il a coordonné les mooks, des magazines-livres « Dune » et « Tout sur Dune ». Il nous parle de son parcours, de son travail et des littératures de l’imaginaire.
🎧 À écouter sur la chaîne YouTube Double Vie.
À retrouver notamment sur Apple Podcast, Spotify et le site Double Vie.
La dose de flow
Musique
Les plus fidèles lecteurs de cette lettre connaissent déjà Balbino Medellin. Je vous en ai parlé dans le Flow 88.
Aujourd’hui, j’ai eu envie de vous partager le morceau « Super Héros ». Je vous laisse apprécier l’humour décalé de cette chanson, nostalgique des séries télé des années 80.
« Oh oh oh oh notre seul pouvoir c’est de faire la gueule, Ou bien d’s’aimer, pour ceux qui veulent »
Inspiration
L’inspiration de la semaine me vient de Marie Desplechin, interviewée par Richard Gaitet dans l’émission « Bookmakers ».
L’émission est excellente et je vous invite à l’écouter en entier. J’apprécie particulièrement ses conseils d’écriture à la fin de l’émission, en substance :
Faites la sieste, marchez, nagez, et si vous n’y arrivez vraiment pas, picolez, mais pas trop.
Écoutez le conseil ici ou l’émission complète :
À suivre
J’ai progressé sur la v5 de ma nouvelle, pour certainement terminer demain avec une v6. Après, promis, je n’y touche plus.
J’ai aussi progressé sur ma novella. Les personnages sont là, le cadre également. Le thème et les grandes lignes de l’histoire aussi. Je vais donc désormais m’attaquer au séquencier détaillé, aux liens logiques entre les scènes, avant de pouvoir commencer la rédaction d’ici deux semaines.
Je vous tiendrai au courant de mes progrès.
D’ici là, je vous souhaite un merveilleux week-end, plein de surprises !
— mikl 🙏
Photo by Ivana Cajina on Unsplash
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