Alors, comment se passe votre week-end ?
Je ne sais pas pour vous, mais j’ai pris une pause de quatre jours. Après cette période confinée, c’est une bénédiction. Je suis toujours à Paris, je ne sors pas beaucoup, mais mon emploi du temps s’adapte ainsi aisément à mes envies d’écriture. Une respiration pour explorer des thèmes qui me sont chers. Parmi eux, l’humanité revient souvent dans mes textes. Qu’est-ce qu’être humain ? Qu’est-ce que vivre ? Qu’est-ce que mourir ?
Alors, j’ai saisi l’occasion pour jouer avec le concept d’humanité. Qu’est-ce que cela signifie pour un robot ? La conscience de la mort peut-elle rendre un robot humain ? Voici le résultat de cette tentative d’humanisation robotique.
Bonne lecture !
C’est la vie, bébé
L’homme n’avait pas vu le véhicule de transport. Le passant avait 95 % de chance d’être percuté par la navette qui avançait à pleine vitesse, flottant à 55 centimètres au-dessus du sol.
Alex était proche de lui. Il avait alors réagi instantanément. Pas par altruisme. Lui et les humains cohabitaient, on va dire qu’ils se toléraient. C’était une force intérieure, supérieure même qui avait pris le contrôle, un simple réflexe. Qu’y pouvait-il ? La première loi de la robotique était implantée en profondeur dans son code : « Un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, en restant passif permettre qu’un être humain soit exposé au danger ». Cette règle était sa raison d’être.
Bilan de l’affaire, il s’était précipité malgré lui sur le piéton qui traversait la route pour le faire dévier de sa trajectoire.
Il avait d’abord ressenti une soudaine fatigue. Il regardait le ciel, allongé par terre.
Le choc l’avait secoué. Son corps vibrait encore.
Son modèle de robot ne ressentait pas la douleur. Pour savoir s’il allait bien, il devait attendre le résultat de son système de diagnostic interne.
Il tenta de se lever. Ses membres semblaient engourdis et ne répondaient pas à ses commandes. Il ferma les yeux.
Quand il les rouvrit, c’était pour constater qu’un petit groupe de personnes s’était rassemblé autour de lui. Elles le regardaient, certainement plus par curiosité que pour être utile. Un jeune homme excité par l’événement le filmait avec son communicateur. Un autre, celui qu’il avait sauvé, s’était penché sur lui, souriant tristement. Cet attroupement le mettait mal à l’aise. Il était dans une promiscuité inhabituelle avec les humains.
Le diagnostic interne venait de lui être notifié. Il fonctionnait à moins de 5 % de ses capacités. Ses moteurs, ceux qui commandaient ses membres, jambes, bras, pompaient dans le vide. Le liquide qui animait ses vérins hydrauliques fuyait, giclait sur le sol.
Cela ne semblait pas bon, pas bon du tout même. Il pensa à la mort, cet état dont les êtres humains parlaient avec peur, tristesse. Avec résignation parfois.
Il n’avait pas peur de mourir. Il n’était pas de chair et d’os. La mort n’était qu’un concept dans son corpus de connaissance. Dans la famille qu’il servait, il avait vu la petite fille, Laura, très triste lorsque son chat était mort. Ils l’avaient enterré au fond du jardin et affiché sa photo sur le meuble du salon, près du grand téléviseur. Un autre chat était arrivé. Jeune et joueur, plein de vitalité. Toujours à se prendre dans ses pattes.
C’était peut-être juste ça, la mort. Un autre robot le remplacerait. Différent, mais très proche.
Sa batterie se déchargeait maintenant à une vitesse alarmante. Oui, c’était sûr, il allait y passer, là bêtement, au bord de cette route. Il s’imaginait en rebut dans un centre de recyclage. Les pièces qui pouvaient encore servir seraient certainement revendues.
Il n’avait pas de regret dans sa vie, car il agissait toujours selon des règles rationnelles. Ses actions résultaient d’un calcul mathématique, avec toujours ces trois lois de la robotique pour ultime morale. Il cherchait une conclusion, une phrase spirituelle à dire avant de s’éteindre. Il n’avait rien préparé, pas de punchline. Il composa un message pour Laura : « Hasta la vista, Baby ». Elle apprécierait sûrement le clin d’œil, avant de l’oublier.
L’homme accroupi à côté de lui avait pris sa main. La vision d’Alex se brouilla, comme un écran de télévision à tube cathodique, couvert de neige. Il entendait le passant lui parler, juste le temps d’entre un « Merci ». Sa voix était désormais à peine audible. Elle disparut dans un long bruit blanc, signal radio parasite. Le chant des étoiles.
La dose de flow
Sur mon blog
Je parle cette semaine de la force du groupe dans les projets d’écriture. Même si l’activité est solitaire, les cercles d’auteurs sont un excellent moyen de partager sa passion, de progresser et d’apprendre à plusieurs. J’anime un premier cercle sur les écrits de l’imaginaire et compte en lancer un deuxième club.
Musique
J’ai déjà mis en avant la musique d’un film de Tarentino. Je récidive cette semaine avec un morceau que l’on retrouve dans la bande originale de Django Unchained : Too Old To Die Young. J’ai choisi une version live acoustique avec un son bluesy qui vient des tripes.
Inspiration
Si vous êtes passionnés de science-fiction, ou si vous souhaitez vous y initier, je recommande vivement le podcast C’est plus que de la SF, animé par Lloyd Chéry.
Le podcast couvre tous les genres de la science-fiction : littérature, cinéma, manga, anime. Les interviews sont passionnantes. Honnêtement, ce jeune podcast est une vraie réussite et pourrait devenir une émission incontournable pour les amateurs.
Je propose l’écoute de l’épisode #1 avec Alain Damasio et le #9 sur Battlestar Galactica, mais tous les épisodes que j’ai écoutés jusqu’ici sont excellents, alors lancez-vous !
À suivre
Cette lettre hebdo continue son chemin, ponctue mon rythme d’écriture, battement de cœur, mais surtout connexion régulière avec vous, chers lecteurs.
J’ai balayé styles et thèmes au cours de ces trois mois et demi passés ensemble. J’aime cette diversité, passer d’un sujet à un autre selon mon inspiration. Mais j’aimerai aussi connaitre les thèmes, les sujets qui vous parlent, résonnent le plus en vous.
À vous de jouer, prenez la parole pour me guider sur la suite.
Je vous souhaite un merveilleux week-end !
— mikl 🙏
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Photo by Ivan Vranić on Unsplash
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