Alors, comment se passe votre week-end ?
Le week-end est un temps à part, un trait d’union entre deux semaines. Il ne tient qu’à nous d’en faire une parenthèse pour vivre au-delà du quotidien.
Tout peut y être petit. J’écris des petits textes, mais j’ai appris que cela portait un nom, la microfiction. Ce sont des histoires, des moments de temps qui s’étendent sur seulement quelques mots, phrases, paragraphes ou pages. Ces textes découpent une tranche de vie, saisissent un personnage en un regard.
Le déclencheur est un thème, une phrase, une idée que j’aime tordre et déformer.
Le sujet suivant m’a été suggéré lors d’un atelier d’écriture : un coucher de soleil, une plage paradisiaque, deux amants. Défi relevé, en voici mon interprétation.
Deux
La plage était une mince langue de sable, qui s’étirait entre deux collines rocheuses. Au-dessus, à portée de main, une végétation accueillante s’y était installée. Là-haut, de grands pins s’élançaient vers l’océan, surplombant une bruyère moussue.
Le couple s’était laissé guidé par le murmure des vagues. Calmes, lentes, elles s’évanouissaient en s’avançant à leur rencontre.
La vie ici était soumise à une autre notion du temps. Eux non plus ne se pressaient pas. Ils se déplaçaient avec précaution, comme ces hommes en combinaison, foulant le sol lunaire. Ils ne savaient plus s’ils étaient encore sur terre ou s’ils vivaient dans un rêve. Aucune importance, du moment qu’ils restaient ensemble dans cette crique.
Nul besoin de parler, le silence ne les gênait pas. Le souffle de la brise, le murmure de l’eau, les cris des goélands, parfois, avaient suffisamment à raconter.
Assis sur le muret à l’entrée de la plage, ils attendaient le crépuscule. Enfin, plutôt l’embrasement qui précède l’obscurité. Leur apothéose.
Alexandre serrait la main de sa compagne, Madeleine. Une vie à tout partager, une éternité à se tenir unis. Leur peau était décharnée. Leurs bras étaient maigres et déformés, semblables aux algues échouées sur le sable. Ce contact sec et froid ne les rendait pas tristes, au contraire. L’émotion les enveloppait tendrement.
C’était leur plage. Ils y avaient tellement de souvenirs. Leurs enfants jouaient dans le sable. Leur énergie planait toujours sur ce lieu, empreinte que les vagues ne pourraient jamais effacer. Les petits-enfants, ensuite, bâtissant leurs constructions éphémères avec le même enthousiasme. Sable, eau, ciel. Rien ne changeait ici. Le temps s’était arrêté.
Madeleine lui décrivait ce qu’il ne pouvait maintenant que deviner. Elle lui disait le rougeoiement du ciel, lorsque la boule de feu rejoignait la mer. Il ne voyait plus que des formes floues, des taches lumineuses, mais il savait qu’elle exagérait, pour continuer de l’émerveiller. Le ciel n’était que le reflet de l’océan, ce soir, noir, torturé, presque menaçant. Au loin, le vent avait chassé les nuages. L’horizon brillait d’un jaune pâle. Alors, que la lueur rasait maintenant les flots, elle devenait encore plus intense. Tout était contraste, ombres et lumières. En quelques instants, la clarté vacilla, s’évapora pour accueillir la nuit.
Le spectacle était fini, mais ils se tenaient immobiles. Ils ne voulaient pas faire fuir l’éternité, cet animal farouche.
Engourdie par le froid, Madeleine se leva enfin. Sans un mot, elle caressa la joue d’Alexandre. Lentement toujours, doigts enlacés, ils prirent le chemin du retour. S’il ne pleuvait pas, ils reviendraient demain.
La dose de flow
Sur mon blog
Je présente cette semaine un autre texte court, illustrant un procédé basé sur l’écriture de phrases longues. Voici une microhistoire, en une phrase.
Court métrage
Pour continuer à faire court, voici « Le grand bain ». C’est un merveilleux court métrage de 15 minutes, une histoire de solidarité entre voisins, de connexions et d’humanité. Un grain de folie salutaire pour commencer le week-end.
Musique
Le rap est méconnu et mal compris, parfois méprisé. Il produit souvent des albums ultra-formatés, énervants ou insipides. Mais, c’est aussi un genre profond avec de grands artistes, interprètes et surtout auteurs.
Pour entrer en douceur dans le rap, voici « Entourage », de Youssoupha, un morceau qui donne la pêche, enregistré en live avec orchestre symphonique.
À suivre
Les rencontres d’auteurs continuent. Les séances de narrations synchronisées progressent et sont toujours des moments d’échanges forts entre auteurs. On y parle de nos textes, de nos difficultés de construction, de nos lectures et de nos ambitions d’écrivains.
Le besoin existe au-delà des auteurs de l’imaginaire que je côtoie. Je vais lancer un atelier de ce type sur les écrits génériques. Première séance, avant la fin juin.
Pour m’aider à avancer dans mes nombreux projets, j’ai une question à vous poser. Écoutez vous des podcasts et si oui, de quels genres, sur quels sujets ? Quels sont vos podcasts favoris ?
Merci encore pour vos retours toujours chaleureux.
Je vous souhaite un merveilleux week-end !
— mikl 🙏
Photo by Ivan Vranić on Unsplash
Laisser un commentaire