Alors, comment se passe votre week-end ?
La fête nationale est proche, les bureaux se désertifient, les collègues viennent en shorts et robes légères, les villes commencent à se vider. Ce week-end d’été marque le vrai début de la période de vacances.
C’est ce moment où l’on peut se permettre d’avoir l’esprit ailleurs, d’être plus joueurs, de se reconnecter à notre esprit d’enfant. On dit l’enfant insouciant, mais il a aussi des peurs viscérales qu’il s’autorise à exprimer. Alors, il s’invente des histoires, pour jouer avec, pour les affronter, les regarder droits dans les yeux, en frissonnant pour s’amuser.
C’est ce que j’ai découvert et qui me plait dans le fantastique. C’est un genre qui peut s’avérer profond, connecté à une symbolique éminemment humaine.
Voici un de mes petits contes fantastiques. Je vous laisse le lire et je vous retrouve juste après pour vous donner du contexte.
Conscience
François renaissait dans la fraîcheur de l’aube parisienne. Il savourait le plaisir simple de traverser la ville encore déserte, de sentir le soleil poindre au-dessus des toits en zinc. Dans le Marais, un collégien le doubla à bonne allure. Les yeux rivés au sol, il semblait porté par son immense cartable. Un écusson vert vif se détachait sur son sac : « Enfants pour le climat ».
Le môme avait aligné son pas sur celui de François. Il tournait régulièrement la tête pour jeter un œil en arrière. Dans ces rues désertes, le garçon semblait inquiet et mal à l’aise. Que faisait cet enfant dehors à cette heure ? pensa François.
Séparés de quelques mètres seulement, ils tournèrent rue de Turenne. Accélération, ralenti, instinctivement leur distance restait constante. Ils n’avaient pas croisé de voiture depuis quinze minutes. Le calme absolu devenait pesant quand un bruit de pas attira l’attention de François. Il jeta un bref regard derrière lui. Un autre collégien le suivait. Short court, chemise blanche, cartable, il arborait un look à l’ancienne.
Plus loin, une fillette rejoignit la procession, par une rue sur la droite. François se demandait où diable ils pouvaient tous aller, lorsqu’il réalisa que l’année scolaire était terminée. Il se promit de tourner à gauche à la prochaine artère, mais dans cette bifurcation, une trentaine d’enfants lui barrait le passage avançant vers lui, en silence. Volte-face. Il décida de continuer jusqu’à la place des Vosges. Derrière lui, de partout, d’autres enfants arrivaient, convergeant tous dans la même direction.
— Bonjour, dit François à l’enfant à sa droite.
Imperturbable, il fit mine de ne pas l’entendre.
— Hé, bonjour ! Vous faites quoi, là, tous ensemble ?
La fillette à sa gauche prit la parole :
— Nous avons décidé de sauver la planète, dit-elle.
— C’est un genre de manifestation ?
— Oui, c’est ça. C’est notre manière de protester.
Ils atteignaient la grande place. Enfants, collégiens, lycéens, une foule y était massée. Il entendit une voix fluette au centre de la place :
— Pour protéger notre planète, éviter notre autodestruction, il nous faut éliminer l’Ancien Monde. Il est incapable de changer seul.
Clameur de la foule.
— Aujourd’hui, libérons Paris de sa pollution. Pas de pitié pour les responsables.
À cet instant, il s’aperçut que chacun des enfants tenait un couteau. Derrière lui, d’autres fouillaient leur sac et s’armaient également. François s’arrêta net, recula, mais la pression du cortège le forçait à avancer. Le long couteau de son voisin était couvert de sang. La plupart étaient bien mis, endimanchés, mais des taches de sang rouge sombre maculaient ici leur robe blanche, là leur chemise claire. Panique.
François tenta de forcer le passage pour s’enfuir. Tournés vers lui, les enfants firent bloc. Il sentit une première brûlure dans un rein lui embraser le dos. Une fillette lui sourit avant de lui planter son couteau dans le ventre.
Un instant plus tard, il était couché au sol, recouvert par la masse, saigné par des dizaines de lames s’abattant sur lui. Il put apercevoir le ciel bleu, avant d’être avalé par l’obscurité. Aujourd’hui la terre respirerait un peu.
Notes : J’ai tenté d’ancrer ce conte fantastique dans notre réalité, pour en faire une fable à l’ancienne avec une touche de modernité. J’ai trouvé jubilatoire d’imaginer une sorte de Greta Thunberg pragmatique et sanguinaire, intraitable et bien décidée à sauver la planète malgré nous les adultes.
La dose de flow
Sur mon blog
Cette semaine, je parle du prochain lancement du podcast Double Vie. J’ai déjà enregistré trois épisodes et suis très content du résultat et très impatient de commencer à les partager avec vous, dès la semaine prochaine. Pour patienter, vous pouvez lire le texte qui présente le parti pris de l’émission et écouter le petit teaser.
➡️ Double Vie, le podcast des artistes multi-facettes
Podcast
J’adore le podcast de Fanny Ruwet, Les Gens qui Doutent. C’est un podcast intimiste, qui permet à l’auditeur de rentrer dans des conversations parfois drôles, mais surtout passionnantes du point de vue du processus et du cheminement créatifs.
Voici un autre épisode un peu ancien que je recommande, avec Adeline Dieudonné, autrice du roman La Vrai Vie :
Musique
Cette semaine, je propose un voyage musical dans l’univers de Kadhja Bonet, qui mélange les genres, dans une sorte de soul psychédélique et planante. Voici son morceau le plus connu, Honeycomb. Ce titre est sorti il y a seulement quelques années, mais le son nous transporte dans les années 60 et 70.
À suivre
Lorsque j’ai commencé cette lettre, j’avoue que je ne savais très sincèrement pas où cela me mènerait. Seule me motivait l’envie d’écrire et de partager. Cinq mois plus tard, je suis heureux de m’être écouté et d’avoir plongé les yeux fermés dans l’aventure. Écriture, groupes d’auteurs, je baigne dans un univers qui me nourrit.
Le lancement du podcast amplifie encore tout cela et je suis déjà emballé par les échanges et les discussions que j’ai pu avoir. J’ai hâte de partager tout cela avec vous.
Merci de me lire… et très bientôt, de m’écouter.
Je vous souhaite un merveilleux week-end !
— mikl 🙏
S’abonner
Vous pouvez vous abonner gratuitement à cette lettre hebdomadaire en remplissant le formulaire suivant:
Photo by Ivan Vranić on Unsplash
Laisser un commentaire