Divulgâchage en vue
Attention, si vous n’avez pas encore lu le texte de la nouvelle que je commente dans ce post, allez la lire avec de revenir ici : Fooosch
Une autrice d’un de mes groupes d’écriture m’a écrit à propos du texte de cette nouvelle : « Je suis déçue que le protagoniste ne se serve pas de la tête du proviseur comme un ballon »
J’ai d’abord pensé que c’était surement une scène trop difficile et surement trop outrancière pour trouver sa place dans la nouvelle.
Puis je suis tombé sur le texte de Steven Pressfield, Killer instinct part two, dans lequel il explique que les auteurs se restreignent trop au moment d’écrire leur Grande Scène, celle qui porte le texte. Ils prennent peur et l’édulcorent. J’en parle dans le Flow #32.
Et donc, oui, pourquoi ne pas jouer avec la tête ?
C’est finalement pour ça que j’avais écrit ce texte. Et tout le monde attend cette scène outrancière, car quiconque a vécu une grande frustration administrative sait combien nous avons besoin d’exutoires.
J’avais pourtant plusieurs contraintes à concilier pour y parvenir.
Une nouvelle doit souvent introduire le doute. C’est un outil important pour continuer à faire résonner le texte dans l’esprit du lecteur longtemps après sa lecture.
J’ai tenté de mettre la scène gore de la tête à la fin, mais l’effet de la chute se dissolvait dans cette scène outrancière.
J’ai donc monté le texte différemment en plaçant la scène gore au milieu du texte. L’effet est double: La scène épice le texte, lui donne de la force et elle prépare et amplifie la chute, ouvrant la porte à la violence tout en laissant planer le doute.
Les dernières modifications que j’ai faites sont mineures. Le titre est particulier, jouant sur les sonorités. Il doit intriguer et faire résonner la chute, mais il tombait un peu de manière abrupte.
J’ai donc ajouté des onomatopées, des petits bruits marquants tout au long du texte, pour préparer l’arrivée du bruissement du filet à la fin du texte. Le but était d’augmenter le point focal sur la chute et d’en amplifier l’effet.
Je suis très content de la manière dont j’ai utilisé les mains des personnages comme véhicule des émotions.
J’espère que vous avez aimé ce texte, dans sa version finale.
J’attends vos retours. Dites-moi notamment si vous souhaitez que je continue à détailler le processus de construction de mes nouvelles.
Photo by Nick Morrison on Unsplash
Hé oui, c’est top de voir le cheminement de la nouvelle! 🙂 Je montre parfois mes avant/après à ma cousine pour qu’elle voit l’envers du décors et le travail qu’il y a derrière…
J’ai bien remarqué les onomatopées dans la 2nd version, ça m’a bien plu. L’idée de mettre la scène gore en plein milieu est pas mal, car jusqu’au bout, on se demande s’il va faire du mal au proviseur ou pas…
Mais ce que je trouve le plus réussi, c’est le processus de montée de la frustration, qui permet d’expliquer le geste de Jonathan : il est furieux à la fois de ne pas pouvoir aller au basket (seul endroit où il est admis par ses camarades, et on sait à quel point c’est important pour les ados) et de voir ses parents s’écraser face à l’administration (et ce passage fonctionne parfaitement bien). Je suis moins sensible aux mains, ça fait peut-être trop de mains pour une seule scène. Je reste mitigée sur l’image de l’araignée faisant des pompes : au moins j’ai compris le mouvement, mais d’un coup, j’ai visualisé ladite araignée (en version comique, elle fait des pompes ^^) et je suis un peu sortie du texte.
Très bel exercice et très jouissif en tout cas! 😀
Merci c’est passionnant de découvrir ce qu’il se passe en-dessous, dans l’ombre, avant que la nouvelle n’arrive à la lumière du public.
Je ne suis pas autrice ni en passe de le devenir, mais je trouve ça fascinant tout de même !
Et je trouve qu’avoir osé insérer cette scène outrancière, comme un rêve, emporte en effet la nouvelle et la rend géniale. Ca marche !
Merci de ton commentaire. Ça fait plaisir !