Alors, comment se passe votre week-end ?
Le monde s’agite autour de nous, l’actualité s’affole. Il y a une certaine futilité, car dans le malstrom de stimuli contradictoires qui se déversent sur nous, finalement peu auront une importance critique. C’est la conclusion, la tendance qui importe. Nous pourrions vivre deux semaines dans notre bulle que cela ne changerait rien à notre compréhension du monde.
Hélas, l’addiction aux infos et aux réseaux est très puissante.
Alors, quoi de mieux pour se changer les idées qu’un petit texte fantastique ?
Et oui, cette semaine, c’est fiction !
Voici un texte que j’ai rédigé sur le thème « Retour à la vie », avec une petite contrainte supplémentaire : utiliser le JE pour écrire le témoignage d’une tentative pour ramener des morts à la vie.
Monsieur le Professeur Melvin Fewel,
Avec cette missive, vous devriez avoir reçu une cassette. Surtout, ne vous précipitez pas pour la placer dans votre lecteur et continuez à lire cette lettre, jusqu’au bout.
Je m’appelle Gilbert Legendre. Je suis ingénieur du son. Fasciné par le traitement du signal, je suis spécialisé dans la création de synthétiseurs hors normes. Mon truc a toujours été d’inventer des vibrations qu’aucun autre instrument n’était capable de produire. Pour cela, je pars d’un signal existant que je capte, amplifie et transforme. Tout signal, même infime, est un bon point de départ pour ma création. Qu’est-ce que cela a à voir avec vos propres travaux médicaux, me direz-vous ? J’y viens.
En tentant de capter des signaux faibles dans mon studio près du CHU de Lille, j’ai isolé par hasard des oscillations d’une complexité inhabituelle. Après des mois d’analyse et d’enquête, je les ai corrélés à l’activité du CHU et aux décès y survenant.
J’ai lu vos travaux sur la mort et je suis persuadé, tout comme vous, qu’elle n’a rien d’inéluctable, tout du moins, qu’elle n’est pas immédiate. Je sentais alors que la vibration que j’avais captée pouvait être le début d’une découverte majeure, un moyen de continuer à faire vibrer un être, indéfiniment. J’ai alors travaillé avec le professeur Étienne, afin de pouvoir isoler et enregistrer cette signature humaine.
Nous avons démontré que l’Homme laisse une empreinte persistante de son passage sur terre, comme à la fin d’un concert le silence qui s’ensuit est la continuation de la musique de l’orchestre. Chacun de nous émet un signal, qui change le monde durablement, qui s’ajoute au bruit ambiant pour en modifier la signature. Le monde émet un chant, une harmonique, qui est la composante des vibrations de tous les êtres vivants, ou morts, à proximité. Le corps sert de réceptacle de cette marque unique. À sa mort, le signal continue de vibrer, encore plus intensément, pendant un moment, permettant de l’isoler et de le capturer.
Notre rêve était alors ensuite de pouvoir le reproduire, pour le réinjecter dans une enveloppe corporelle remise à neuf. Offrir un nouveau véhicule à ce signal. Les premières tentatives ne menèrent nulle part. Le corps était souvent trop endommagé. Il fallut alors bricoler, rafistoler pour réparer ces enveloppes charnelles. En utilisant plusieurs corps de défunts, il est possible de remplacer les éléments défectueux de l’un, par des organes en pleine santé de l’autre.
Pourtant, ce n’était pas suffisant. Nous avons échoué des dizaines de fois, avant de saisir le point que nous avions ignoré. Tout comme un sang ne peut pas être donné à n’importe quel receveur, un organe doit aussi être compatible au niveau de son signal. J’ai pu dresser une table de correspondance des signaux, une typologie, qui permet de classer les corps par leur indice vibratoire. Deux corps avec un indice vibratoire compatible peuvent servir à réparer et à ramener à la vie l’un des deux êtres.
Après cette découverte, il fut trivial de rejouer le signal du défunt avec des haut-parleurs puissants pour le réinjecter dans un corps hybride. Après une dizaine de minutes d’exposition à cette musique de vie, le cœur du défunt se remit à battre, d’abord s’emballant, se contractant frénétiquement, avant de retrouver fréquence humaine. Puis l’homme respira à nouveau. Placé en réanimation, il a rouvert les yeux hier.
La cassette que vous avez entre les mains contient le signal de William B., le premier être que nous sommes parvenus à ramener à la vie. Nous serions ravis de vous le présenter, au service de réanimation du CHU de Lille, plusieurs semaines après son décès enregistré.
Dans l’attente de vous rencontrer,
Bien cordialement,
Gilbert Legendre
Podcast
Cette semaine, le podcast Double Vie accueille Marjorie. Elle est infirmière et travaille surtout la nuit. Le jour, elle puise sa force, son énergie et son inspiration dans l’écriture, jonglant entre les ateliers d’écriture, le DU (Diplôme Universitaire) qui doit l’amener à devenir coach littéraire et son propre projet de roman.
🎧 À écouter sur la page Double Vie.
À retrouver également sur Apple Podcast.
La dose de flow
Musique
Le morceau Stairway to heaven de Led Zeppelin est un des morceaux les plus riches de l’histoire du rock, repris de nombreuses fois, adapté, transformé, transcendé.
Aujourd’hui, je suis puriste et voici une version live par Led Zeppelin en personne, enregistrée au Madison Square Garden en… 1973.
10 minutes en apesanteur.
Inspiration
Victor Ferry a partagé dans son canal Telegram un résumé intéressant du livre The Righteous Mind de Jonathan Haidt.
Qu’est-ce qui est si inspirant dans ce bouquin ?
Et bien, Jonathan Haidt tente d’expliquer pourquoi même des gens raisonnables peuvent avoir des difficultés à échanger et comprendre le point de vue de l’autre, sans même parler de se convaincre.
Ce professeur a émis une théorie sur les fondations morales de notre société. Il a isolé six piliers qui nous permettent de juger de la valeur morale d’une action : le soin, la justice, la liberté, l’autorité, la loyauté et le sacré.
Les trois premiers piliers sont plutôt progressistes, les trois derniers sont plutôt conservateurs.
Or, il se trouve que nous nous rattachons et pouvons nous identifier à toutes ses valeurs, car elles sont universelles, mais que nous avons tous une hiérarchisation différente de ces valeurs. C’est ce qui fait que fondamentalement nous sommes plutôt de gauche ou de droite.
Cela explique pourquoi une discussion entre deux personnes ayant une priorisation différente des valeurs peut être animée.
La bonne nouvelle, c’est que ces piliers sont universels. Il est donc possible de comprendre l’autre et d’admettre que la hiérarchisation de ses valeurs est différente.
Pourquoi est-ce important aujourd’hui ? Parce qu’en gardant en tête que nous sommes tous attachés à un ensemble de six piliers moraux universels, nous pouvons à nouveau dialoguer. Nous ne sommes pas fondamentalement opposés par nature, mais nous avons juste une priorisation différente de nos six piliers.
Voilà pourquoi, je trouve en effet ce texte important pour contribuer à ramener les discussions de société sur le terrain de l’entente et de la compréhension mutuelle.
À suivre
Le Défi du Roman d’Automne a bien démarré. Pour moi, ce sera à nouveau un week-end d’écriture. En une semaine, j’ai réécrit et affiné mon synopsis et écrit trois épisodes de mon histoire. Ça prend forme, donc, et ce week-end sera l’occasion de rattraper le retard pris dans la semaine sur le défi.
Vous pouvez suivre mes discussions sur l’écriture sur le canal Telegram Double Vie.
Je vous souhaite un très bon week-end cocooning !
(Avouez que cela sonne mieux que le triste « bon confinement » que l’on commence à entendre régulièrement 😉).
— mikl 🙏
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Photo by Ivan Vranić on Unsplash
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