Dans notre imaginaire collectif, on oppose souvent la gestion, le business, avec la créativité, associée à l’art. Les plus agés d’entre nous se souviennent de la fameuse chanson de Starmania « Le Blues du Businessman ». Le milliardaire cynique et malheureux chante: « J’aurais voulu être un artiste », tout en maintenant son emprise sur son entreprise et sur la société en général.
Le besoin de créativité fait partie intégrante de notre humanité. La créativité est un des moyens de découvrir qui nous sommes réellement puis de l’assumer vis-à-vis des autres. C’est également, à divers degrés, un facteur important d’accomplissement.
Dans la tourmente du quotidien et des affaires, on pourrait penser que business et créativité sont parfois irréconciliables. On retrouve dans cette opposition le conflit entre rationalité et émotion, entre hémisphère gauche et droit dans le cerveau.
Entre business et créativité, il faut choisir…
Vraiment ?
Je suis convaincu que gérer une société, un produit, une équipe, un projet est un travail par essence créatif. Dès lors que l’on se projette dans la durée, il faut imaginer, créer un futur à la fois crédible et désirable.
Lorsqu’on est vraiment à l’écoute des situations que l’on doit gérer, on réalise que les problèmes que l’on doit résoudre nécessitent de la créativité. Le management est un domaine prolifique en livres de recettes, méthodes et méthodologie. Avec le recul, en pratique, ces livres n’ont souvent que valeur d’exemple. Ils illustrent une manière de résoudre des problèmes, à un moment précis, pour un ensemble de situations similaires. Mais les situations sont rarement identiques. Il faut alors trouver des analogies, croiser des idées.
Car la créativité est finalement nécessaire à l’innovation et au développement des entreprises. Les innovations dans un domaine sont souvent issues d’applications de principes découverts ou appliqués dans d’autres domaines. Les réseaux de neurones, au cœur des techniques d’apprentissage automatique utilisées par exemple pour la classification d’images, s’inspirent d’une modélisation conceptuelle du fonctionnement du cerveau.
Notre capacité à voir le monde différemment fait une vraie différence. Le recul, la pensée orientée design, le travail d’équipes pluridisciplinaires, etc. La vie des entreprises est rythmée par sa résilience, sa capacité d’adaptation et sa puissance créatrice.
Alors, à quoi est dû ce blues du businessman ? Je ne pense pas qu’il soit dû à un manque de créativité dans le métier, mais il survient plutôt lorsqu’on est en proie aux doutes.
Le doute peut avoir des causes plus ou moins profondes. S’il résulte d’un manque de sens, et dans ce cas, il faut le traiter en cherchant le « pourquoi », en réajustant la mission de l’entreprise (Simon Sinek, Find your Why).
Dans tous les cas, le doute est un signal de notre intuition qu’il faut écouter. Le doute nous incite à prendre du recul, à trouver une autre manière de voir les choses. À bien des égards c’est un appel à utiliser sa créativité, justement.
Le doute est souvent l’expression de notre intuition envoyant un signal à notre raison.
Pour dépasser nos blocages et retrouver créativité et innovation, il faut d’abord aiguiser son intuition, l’écouter et l’analyser pour réapprendre à sentir lorsque nous sommes sur la bonne voie, comme le marin sent le vent et les courants. Il faut céder à une forme de lâcher-prise. Il est plus facile de naviguer dans le sens du courant que de le remonter. Il faut donc écouter les signaux pour pouvoir, à nouveau, se sentir porté. Si le changement est radical, on appelle cela un pivot, mais c’est souvent simplement d’un ajustement dont nous avons besoin.
Prêter attention à nos doutes, c’est finalement retrouver le chemin de la créativité.