Investissez dans la liberté

Investissez dans la liberté


Créativité   •   31 juillet 2020

J’adore et je hais le mot « pragmatisme ».

J’aime comme il référence le bon sens, le sens pratique.

Il inspire un état d’esprit et une philosophie de vie, qui consiste à avancer pas à pas un peu chaque jour.

Je déteste pourtant la manière dont il est associé aux compromis voire à la compromission.

Peut-on être un·e artiste pragmatique ?

Dans la vision romantique de la création, non.

L’art est au-dessus des conventions sociales, l’art dénonce. L’acte de création est souvent perçu comme pur. C’est peut-être le cas. Et encore, je ne sais pas si une telle pureté à 100 % existe.

Pourtant, la vie d’un auteur, d’une autrice est pragmatique. Presque par essence. La création ne se fait pas uniquement lorsqu’on est retiré du monde, de la société, dans une vie monacale.

J’ai lancé il y a trois semaines le podcast Double Vie. J’aurais pu l’appeler de différentes façons, mais le but reste toujours le même. Montrer que l’essence de la création vient de cette Double Vie. Auteurs, autrices vivent dans le monde, s’adaptent, font avancer leurs projets pas à pas. Avec pragmatisme.

Hier, je lisais un des nouveaux livres de Steven Pressfield, Nobody wants to read your sh*t (« Personne ne veut lire votre merde »). Le chapitre 25 « It’s okay not to be 100% pure » éclaire cette dualité (Pressfield a travaillé dans la pub) :

« Il est acceptable de ne pas être pur à 100 %

Ridley Scott a travaillé dans la publicité. Même chose pour Satyajit Ray, Scott Fitzgerald et Salman Rushdie et des centaines d’autres, qui ont produit des œuvres immortelles dans le vrai monde artistique.

– Steven Pressfield, NOBODY WANTS TO READ YOUR SH*T

Le temps passé dans un travail qui n’est pas artistique n’est pas du temps perdu. C’est un raisonnement à l’envers.

Ce travail ne nous rend pas prisonniers. C’est un investissement dans notre liberté en tant qu’artiste.

C’est même cet investissement qui nous rend libres de créer.

À condition de ne pas se lamenter, de ne pas regretter ce que l’on perçoit comme des compromis, de se bouger pour utiliser cette liberté.

Remplir cette liberté de temps de création.

Rappelez-vous ce sentiment de liberté que l’on ressent quand on est jeune et que l’on devient indépendant, quand on touche son premier salaire, paie son premier loyer, déménage dans son propre appartement.

Rien n’a changé. Notre liberté s’achète toujours d’une manière ou d’une autre, mais peut-être avons-nous perdu la force ou le goût de l’utiliser.

Les interviews que je mène dans le podcast Double Vie sont là pour nous le rappeler. Loin des compromis, c’est un voyage au cœur de l’acte de création. J’échange avec des auteur·rice·s, des musicien·ne·s qui conservent leur capacité d’émerveillement (ou de désenchantement) et trouvent l’énergie pour utiliser cette liberté.

Alors, changez de perspective.

Soyez pragmatiques et investissez sans regret dans votre liberté créatrice.