Hello les amies,
Je me sens un peu comme l’équipe technique du CSG, le Centre Spatial Guyanais, face à une Ariane sur son pas de tir qui a besoin d’une pièce de rechange.
Force est d’admettre qu’un report est nécessaire. Pas de tir aujourd’hui pour le chapitre 18 de la Plaie. Pour être transparent, je ne suis pas parvenu à caler cet épisode comme je le souhaitais. J’hésite encore pour savoir si ce qui vient dans le chapitre 18 serait mieux dans le chapitre 19 et vice-versa. En gros je prépare deux épisodes quasiment en même temps et c’est un vrai chantier. C’est la vie 🤷♂️
Il est vrai que c’est aussi la dernière ligne droite pour finaliser la nouvelle que je dois rendre lundi pour les Amazonies Spatiales. Elle est prête, ou presque, mais dois encore être légèrement raccourcie pour tenir dans la contrainte imposée. J’aurai encore quelques ajustements à prévoir demain.
Et pour finir, les vacances approchent et il reste des tâches à dépiler au boulot pour partir serein.
Tout cela pour dire que le prochain épisode de la Plaie arrivera à la rentrée.
Pour patienter, je vous partage un texte écrit en Guyane, le jour où nous avons appris que le dernier tir d’Ariane auquel nous devions assister était repoussé. Nous étions alors en visite à l’Institut Pasteur de Guyane et cela m’a marqué 😁
Bonne lecture !
Pas de tir
Le professeur de sciences spatiales fait les cent pas derrière son bureau. Il s’arrête, prêt à décocher un fulgurant sourire, comme lorsqu’il s’apprête à envoyer un missile Soyouz. Le silence soudain capte mon attention. Je me crispe en attendant le coup bas.
— Est-ce que vous savez pourquoi on appelle l’espace de lancement le pas de tir ?
Touché !
Je l’ai compris dans ma chair. Il n’y aura pas de tir demain. Je hoche la tête, le regard perdu dans un verre de Maracaïpi. La glace pilée fond tristement au fond du verre vide. Y avait-il de l’alcool ? Dernière longue aspiration, j’émets le bruit enfantin d’une intestine succion, mes boyaux se tordent. Personne ne le remarque dans le brouhaha du bar. Je m’accoude face au parking. Sur le roof top, deux grues illuminées m’évoquent ce lanceur qui ne décollera pas.
La fatigue m’a vaincu. Des insectes dévorent mes rêves, puis mes songes se peuplent de chauves-souris insectivores, elles gobent les moustiques qui s’échappent de leur nursery, simples boîtes de plastique alignées sur une paillasse.
Une espèce de vampire, chauve-souris en peluche cette fois, me regarde, envieuse, sensuel, lubrique. Hématophage ! J’imagine ses petits crocs tranchants comme des lames de rasoir se planter dans mon cou, remonter sur ma nuque, mordre mes lobes, ne rien lâcher, s’accrocher à moi comme des pendentifs.
Je me réveille en sursaut. J’ai encore rencontré en songe les animaux qui m’entourent, m’habitent, me vampirisent. Je suis le Gardien. Seul dans mon zoo de glace, je traverse l’espace, sans réelle destination, avec un pour objectif la préservation des espèces, de leur mémoire surtout. Je veux pouvoir témoigner de leur existence, de leur liberté d’avant. Tout peut renaître de leurs fragments d’ADN, ailleurs, sur une autre planète. Je continue à y croire.
J’ai toujours aimé les animaux. À l’association, on m’avait surnommé Noé. Avant le départ, mes compagnons m’appelaient parfois l’archiduc. Le duc de l’Arche, ça y est, tu as la réf ?
Je te parle, car je n’ai personne d’autre, alors pardonne mon intrusion, esprit inexistant, fruit de mon imagination.
Je flotte dans l’espace et les vapeurs d’alcool que je synthétise. Un batch modeste, petite production, ici, dans mon arche spatiale. Je suis fier de ce sombre breuvage, il m’aide à tenir, à aller jusqu’au bout du voyage, à oublier qu’il est sans fin.
Dans mes périodes de réveil, je rends visite à ma collection d’espèces rares. Les bêtes me racontent leur vie, leur milieu, leur rôle. Je suis l’avoir, elles étaient l’être. Je les vois s’animer, hallucination, condensation qui s’échappe du congélateur buffet dans lequel je les stocke, en vrac. Le rangement n’est pas mon fort. Le jaguar, petit ocelot, me regarde, les pattes en l’air du fond de sa prison de glace. Je le retourne pour me plonger dans son regard vitreux. Je me souviens de notre première rencontre en Guyane, le long de la route nationale. Percuté par une voiture qui roulait un trop vite. J’entends encore le cling sur la carrosserie. L’alarme du congélo me tire de ma torpeur, me rappelle qu’il est temps de refermer la porte. On ne recongèle jamais un jaguar mort.
L’ordinateur de bord m’intime de rejoindre ma place dans mon caisson de cryogénisation. Rendez-vous dans quelques années, mes trop précieux compagnons de voyage !
— Noé, le 15 juin 2075
Podcast Double Vie Fromaginaire
Le podcast Double Vie revient sur le succès de l’anthologie Fromaginaire, au travers d’un podcast d’interviews à huit voix. L’équipe Fromaginaire raconte la genèse du projet, sa conception, et donne la parole à une partie des autrices et auteurs qui ont construit ce projet un peu fou.
Bonne écoute !
🎧 Fromaginaire, interviews croisées · Double Vie
La dose de flow
Musique
Allez, cette semaine, j’ai envie de retrouver un groupe qui m’a longtemps accompagné. Je vous laisse avec un petit Dionysos pour la route.
J’ai choisi l’Homme Sans Trucage, avec la participation de Jean Rochefort, comme une occasion de revoir cet acteur incroyable.
À suivre
Ça y est, ça devait arriver, c’est la pause du flow. Je vous abandonne à vos propres lectures pour le mois d’août. D’ici là, je vais évidemment continuer à écrire, mais à un rythme différent, avant de vous retrouver le 2 septembre pour la rentrée du flow.
En attendant, je vous souhaite un merveilleux mois d’août et de bonnes vacances si vous avez l’occasion d’en prendre.
— mikl 🙏